
Les parisiens sont des gens simples. Ils ont une vision binaire du monde: Paris et la province. Aux mieux, ternaire pour les personnes les plus nuancées: Paris, la banlieue, la province. Je ne sais même pas ce que c'est la province. A Londres au moins les gens ne considéraient même pas ce qu'il y avait en dehors de la capitale, pas de mépris, juste un no man's land. Et quelques pubs.
Ici, on ne dit pas « je déménage à Toulouse » mais « je pars en province » - comme s'il s'agissait d'un autre pays. Certes, le mode de vie n'est pas le même quand on vit dans une capitale mais en province le métro, internet et la presse gratuite existent aussi (indicateurs de développement).
Bref.
J'ai beaucoup stressé, ai beaucoup planifié dans le vent, imaginé ce que pourrait être mon année hors province, à Paris. Et la vie est pleine de surprises. Je me voyais dans un petit appart au coeur de la ville, en collocation avec des inconnus; je me voyais me ruiner pour payer mon loyer et des billets eurostar, ou des trajets Paris-province; je me voyais comme une tâche d'encre sur la marge d'une copie, comme une intruse dans une fac de bourgeois presque nationalistes (plus par tradition que conviction); je me voyais fonder un journal étudiant d'opposition; Le Cercle, l'association extrêmiste cachée de la fac Panthéon-Assas m'aurait envoyé des lettres de menace; je me voyais arracher des affiches du FN; faire le sieste dans le jardin du Luxembourg entre midi et deux.
Finalement, j'ai reçu un coup de fil. Et je vais à Nanterre, dans la fac de gauchistes, implantée dans une ville communiste, perpétuant l'héritage de mai 68. Finalement je vais faire dans le développement durable. Finalement, je n'ai pas galéré pour trouver un appart mais ai été pistonnée. Finalement je vais vivre à Courbevoie chez les riches, dans une maison avec 6 chambres, grand salon et jardin.
Je me suis inscrite après mille et une péripéties. Je connais tous les bâtiments de la fac. Il y a même un cour de tennis et une piscine. J'ai du faire la queue pour m'inscrire, au milieu des première année, et je trouve ça insultant. J'avais envie de leur dire que 70% d'entre eux encombraient, perdaient leur temps et me faisaient perdre le mien. Comme si j'étais au sein d'un jeu de télé réalité et que je savais d'avance quels candidats allaient être éliminés.
Dans quinze jours je vais officiellement quitter « la province ». Et c'est là que ça va devenir vraiment intéressant.
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